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Pour en etre entendu, nous avons imagine une affaire idiote (vous savez que vous pourrez compter sur nous). Celle d’une petit fille dotee via le dos d’une tache de naissance en forme de dragon.
Photoshop a l’appui, nous avons envoye ce faux temoignage –je sens qu’elle fera partie de moi, souvenir d’une life anterieure, elle me brule quand j’suis en colere, etc.– a HotSpot Media, l’une des nombreuses agences de presse britanniques specialisees au sein d’ l’achat d’«histoires vraies». La reponse n’a jamais tarde. Et une mytho gros comme le Ritz dans la Khaleesi dermique a bien failli se retrouver au sein des tabloids anglais.
Dix minutes d’interview au telephone et notre interlocutrice paraissait convaincue du potentiel de l’histoire. Quel que soit qu’elle n’ait pas de sens ou que l’une des photos envoyees provienne de Google Images (et qu’il aurait donc fallu environ dix minutes Afin de decouvrir qu’elle est bidonnee). Avant de signer le contrat ainsi que ceder les droits exclusifs, nous avons revele la supercherie.
«Nous n’avons pas de base de donnees des taches de naissance en forme de dragon, s’est defendue la journaliste. Nous ne pouvions donc nullement verifier que la histoire etait belle avant de vous envoyer 1 photographe.»
Pop urban legends
Fair enough, Albert Londres, sauf qu’a regarder les news publiees par l’agence l’etape photographe reste loin d’etre obligatoire. Mes infos insolites paraissent de tels boosters d’audience que rares paraissent nos medias qui resistent a en diffuser. Quitte a oublier en cours de route quelques regles elementaires de deontologie journalistique, comme la verification des sources.
Des infos https://datingmentor.org/fr/bbwcupid-review/ payantes
C’est que, dans la course au clic, tout n’est gui?re affaire de vertu. Dans une enquete publiee en avril, trois journalistes de BuzzFeed ont demonte les pratiques de Central European News (CEN), une bri?ve agence de presse basee a Vienne, mais gros fournisseur de contenus insolites –et apparemment faux. Citations inventees, details croustillants ou photos sorties de un contexte, par rapport aux journalistes de BuzzFeed, CEN ne reculerait devant que dalle pour rendre ses histoires plus sexy. Un exemple? Notre pecheur russe attaque par un ours dont l’aventure a fera le tour du monde n’a pas ete sauve via sa sonnerie Justin Bieber mais via l’horloge parlante de son telephone. Un detail qui permet d’ameliorer la viralite de l’histoire, mais qui fait toute la difference entre une info et de la fiction.
Pourtant, Craig Silverman, co-auteur de l’enquete, professionnel du hoax et redacteur a BuzzFeed Canada, tempere:
«Je ne pense gui?re qu’il y ait nombre d’agences qui inventent des histoires ou ajoutent de faux details. Je crois, et j’espere, que CEN est une exception.»
Contacte avec Stylist, Michael Leidig, le fondateur de CEN, nie, quant a lui, tout seulement les allegations de BuzzFeed (meme s’il reconnait des erreurs). Neanmoins, refuse de devoiler ses secrets de fabrication «a un concurrent» (bravo pour l’hommage a une rubrique D’Ailleurs). Il va suffire pourtant de se balader quelque peu sur le web concernant connaitre les methodes de peche a l’info des pourvoyeurs d’insolite. Talk To The Press, South West News Service (SWNS), HotSpot Media et une pelletee de journalistes freelance, ils sont nombreux a vouloir entendre vos recits de perte de poids, d’abus sexuel, de maladie rarissime par exemple histoire buzzable. Comme celle de ce couple transgenre «ou maman etait papa et papa est maman», de cette soeur enceinte qui ne peut s’empecher de manger de la cire Afin de meubles ou du penis de ce stripteaseur assure a 17 millions d’euros. Un business lucratif qui se donne la faculte de vous faire parler.
Ils paraissent nombreux a vouloir entendre toutes vos recits de perte de poids, d’abus sexuel, de maladie rarissime ou autre histoire buzzable
Sur le site de l’une des principales agences, SWNS, on annonce nos prix: plus de 250 euros Afin de une affaire interessante ou inhabituelle, 700 si elle est reliee a l’actu et jusqu’a 14.000 euros si elle implique une celebrite ou un individu publique. Voila qui reste tentant…
Notre charme WTF de l’Orient
A Exclusive Pix, une agence de photo britannique qui fournit une bonne partie des tabloids en news people et insolites, on ne bidonne pas les infos, comme nous l’assure Nick York, le fondateur:
«C’est notre reputation qui reste en jeu, ce serait idiot.»
Ses folles histoires, ses journalistes vont les chercher concernant le terrain –renseignes par des sources dont il taira des noms et Notre nature. Notre recette: legerement d’etrange (comme cette vache a cinq bouches ou ce cochon ne avec une trompe) et de nombreux conditions physiques rares (comme cet homme dont le c?ur reste dans l’abdomen). Souvent des nouvelles venues de Chine, de Russie, d’Inde ou d’Indonesie.
«C’est la ou des histoires etranges se passent. En Europe, l’economie reste forte, les gens ont de bonnes routes, des voitures, des services medicaux, des assurances sante. Nous relatons des situations ou les mecs ne peuvent nullement s’offrir ce genre de trucs, et qui sont donc plus enclins a alerter des medias dans l’espoir d’obtenir de l’aide.»
Tete de vainqueur
Meme discours a Quirky China News, une agence photo specialisee en infos decalees made in China. Notre fondateur, Feng Lu, explique se reposer sur une armee de 10.000 journalistes freelance qui couvrent le lieu a J’ai recherche d’infos incroyables (Gollum vu au sein des montagnes chinoises, votre chien enfante via un mouton). Un coup des informations recus, l’equipe de Feng Lu se livre a votre fact-checking en solide et due structure, nous assure-t-il. (Pour info, Gollum etait un acteur de sci-fi en pause pipi.)
A CEN, ils font environ une dizaine de salaries, nous affirme Michael Leidig, repartis en Asie, Amerique du Sud et Europe. Pour le est, «CEN fonctionne exactement pareil qu’ailleurs. On obtient des infos, on des verifie du mieux qu’on peut et on les publie Lorsque l’on reste entendu que c’est vrai».
Le cycle de l’info
Et c’est parti Afin de une propagation a vitesse haut debit. Un coup vendue via l’agence, l’info va i?tre bien souvent parue sous la signature du journaliste qui se chargera de l’editer avant de la publier. Avec, Afin de seule source, le credit photo. Et i nouveau.
«Dans l’heure qui suit, ce papier donne naissance a cinq ou dix articles qui renvoient tous a un endroit different, remarque Craig Silverman. Tenter de remonter jusqu’a la source attrayante, c’est souvent fort dur.»
